La pensée du Taiji.
"Bien que notre technologie moderne nous ait propulsés dans l'ère de la conquête spaciale, la motivation des êtres humains reste mystérieuse. Les réalisations humaines semblent minces comparées au progrès historique de la civilisation. Cependant, même nos théories sur l'évolution sont discutables. En dépit de toute notre technologie, nous regardons toujours vers l'immensité de l'univers et nous continuons à nous poser des questions sur son origine.
Quand nous regardons avec fierté et joie la trajectoire d'un gros porteur dans l'azur, il est facile d'oublier qu'il ne s'agit que d'une imitation du vol des oiseaux. Nous nous sommes simplement servis de principes aérodynamiques qui existaient des milliers d'années avant l'apparition de l'homme. Notre avancée technologique en matière médicale nous a propulsés au niveau super-sophistiqué de la transplantation d'organes mais nous demeurons prisonniers de besoins primitifs, comme respirer et manger.
Il se peut que nous, les humains, habitants de la terre, ayons a réaliser que nous n'avons pas fondamentalement évolué par rapport au début. Il se peut que nous réalisions que nous ne pouvons pas changer grand chose à notre nature.
Un regard acéré sur l'histoire du monde révèle des cycles évidents au cours desquels le développement de la personne humaine a été ou bien ignoré ou bien surestimé. Quand la nature humaine a été idéalisée, cela donnait une civilisation forte et créatrice, sur laquelle la société se forgeait avec une dominante spirituelle. Mais de nombreuses erreurs ont surgi au cours du voyage.
Il y a plusieurs milliers d'années, un tel idéalisme a émergé en Chine. Les Chinois de cette période recherchaient la forme la plus élevée de vie du corps et de l'esprit. A leur façon unique et personnelle, ils ont atteint leur but, contrairement aux civilisations de l'occident, qui séparaient le corps et l'esprit et concevaient le développement spirituel seulement en termes religieux ou d'extase mystique.
Les Chinois pensaient que l'esprit humain était par essence infini mais l'activité humaine limitée. Ils portaient toute leur attention sur une vision unifiée de la vie humaine et sur une simplification des croyances. Ce fut la naissance de ce que nous connaissons aujourd'hui comme la pensée du Taiji...
Taiji signifie "l'ultime". Cela désigne l'amélioration et le progrès vers l'illimité. Cela signifie l'immense existence et la grande éternité. Les nombreuses directions où l'influence du Taiji se faisait sentir étaient soumises à la théorie des contraires : Le yin et le yang, le négatif et le positif. Ce qu'on appelle parfois le Principe originel. On pensait également que les influences variées du Taiji pointaient dans une seule direction : l'ultime.
On atteind le niveau ultime ou l'on se dirige dans cette direction, au moyen de l'échelle de puissance équilibrée et de son mouvement naturel Yin, (la puissance négative qui subit l'action) et Yang, la puissance positive (qui fait l'action). D'un point de vue théorique, c'est l'interaction des forces constructives et destructives qui donne naissance à la vie et manifeste le monde matériel. Les mouvements spiralés de ces forces semblent sans fin...
Le Taiji.
Pendant des milliers d'années, le système politique en Chine fut basé sur la brutalité et la coruption. Ceux qui se destinaient à la vérité se nommaient eux-mêmes Taoiste ou "Hommes des montagnes" et ils menaient une existence semblable à celle des moines. Dépositaires de l'esprit de la philosiphie du Taiji, ils n'interfèraient en rien avec le pouvoir. Puisque le Taiji possédait son propre système indépandant et n'avait rien à voir avec la structure politique, même des petites communautés d'hommes isolés pouvaient croître et se développer.
Tandis que ces groupes n'avaient aucun lien avec l'autorité gouvernante, leurs recherches étaient néanmoins respectées des gouvernants, d'abord en tant que connaissance acquise puis plus tard sous la forme d'une religion. Petit à petit, on en vint à considérer le Taiji comme une forme très avancée d'art populaire, qui devait être étudiée par les intellectuels et transmise de génération en génération.
Il y a environ 1700 ans, un célébre médecin, Hua-To, affirma la primeur de l'exercice mental et physique pour améliorer la santé. Il croyait que les humains devaient s'exercer à imiter les mouvements des animaux comme l'oiseau, le tigre, le serpent ou l'ours, afin de redécouvrir les capacités naturelles qu'ils avaient perdues. Dés lors il conçut un système populaire de combat appellé le Jeu des Cinqs Animaux. Ce fut là le premier véritable art martial de Chine. Les Chinois continuent encore au jourd'hui de pratiquer le Jeu des Cinqs Animaux pour améliorer leur santé.
Vers 475 de notre ère, Ta-Mo (Bodidharma) partit en Chine pour y répandre son enseignement religieux et il résida au Temple de Shaolin dans la région de Tang Fung, au nord de la Chine. Il ajouta à la prière et à la méditation un entrainement physique quotidien. Il utilisa le jeu des Cinqs Animaux pour promouvoir chez ses fidèles une discipline reposant sur l'équilibre du corps et de l'esprit. La dévotion envers le Boudhisme, combinée avec le temps très important accordé à la pratique, permirent au Jeu des Cinqs Animaux d'atteindre le statut d'Art Martial dans sa plus haute expression.
Quand les fidèles de Ta-Mo répandirent leur foi religieuse à travers la Chine, leur accomplissement en matère d'arts martiaux le fut aussi. Ce système développé par les moines de Shaolin devint célèbre comme le système martial du Temple de Shaolin. Le renforcement du corps et le développement de l'esprit y avait prépondérance. Cela fut l'aube du développement systématique des arts martiaux "externes" en Chine.
La composante mentale du système Shaolin reposait principalement sur la méditation Boudhiste. Ceux qui sont imprégnés de la philosophie Yin/Yang et du Taoisme le considèrent encore comme un simple système de combat.
En l'an 1200, le moine taoiste Chang San Feng créa un temple sur la montagne Wu-tang pour pratiquer le Taoisme dans le cadre de la recherche de la perfection humaine. Le maître Chang affirma que l'harmonie du Yin et du Yang était un moyen de dynamiser les capacités physique et mantales, ainsi que la méditation naturelle et les mouvements naturels du corps nourris par l'énergie interne, qui elle-même serait développée en arrivant à un certain niveau de réalisation.
Étant donné que le système de Shaolin avait été répandu dans toute la Chine depuis des centaines d'années, l'idée d'adapter la théorie taoiste à la vie quotidienne au lieu de la cantonner à une forme de ferveur religieuse fut acceptée facilement par la société chinoise. La pensée du Taiji et sa philosophie Yin/Yang se transforma rapidement en une organisation de style monastique sur le modèle de celle du temple de Shaolin. Une certaine forme modifiée de cet entrainement fut adoptée afin de promouvoir le système sophistiqué comme une mission.
Depuis le commencement, le système monastique de Wu-tang mit l'accent sur la force interne et la recherche dee la sagesse. C'est ainsi que les Chinois font référence au système "interne" pour le différencier du système de combat de Shaolin...
...Comme beaucoup de concentration et d'efforts étaient nécessaires, ainsi que beaucoup de dévouement, afin d'atteindre un ceratin niveau d'accomplissement dans le Taiji, un système monastique se développa bientôt. L'enrôlement était un privilège et ceux qui atteignaient de hauts niveaux de réalisation devenaient les leaders de ce système, suivis par des fidèles enthousiastes, dans une relation unique de maître à disciples...
...Les maîtres de Taiji étaient considérés comme l'incarnation de la sagesse et inspiraient un grand respect, surtout parce qu'ils pratiquaient justice, charité, qu'ils éduquaient et enseignaient l'art médical.
Les adeptes du Taiji pensaient que les gens parviendraient à se disciplner pour s'élever spirituellement, devenir meilleurs, se montrer plus intelligents et parfaire leur santé. Qu'ils seraient à même également d'aider les autres à atteindre le même niveau d'accomplissement qu'eux, de savourer la vérité, de combattre le vice et l'injustice et de protéger les nécessiteux et les faibles. C'est avec ces objectifs à l'esprit qu'ils renforcèrent et développèrent l'aspect martial du Taiji.
Il fut facile d'appliquer les théorie du Taiji aux arts martiaux. L'harmonie du corps et de l'esprit, en accord avec l'ordre naturel des choses, était au coeur du Taiji. Ce qui offrait une direction d'évolution complétement différente de celle des autres formes de combat et donnait lieu aussi à de surprenants résultats en termes de capacités humaines venant du pouvoir de l'esprit. En conséquence de quoi le Tai Chi Chuan devint l'art martial le plus formidable jamais créé...
...Dans les périodes de paix et quand le besoin d'apprendre à se défendre eut disparu, ceux qui enseignaient leur art de manière professionnelle continuèrent à professer suivant un mode familiale. Ils apprenaient seulement à ceux qui se montraient vraiment intéressés et surtout à leur progéniture, pour qu'elle puisse à son tour en faire profession.
Les noms de famille finirent par devenir associés aux différents styles de Taiji qui étaient transmis de bouche à oreille de génération en génération - par exemple le style Chen, le style Yang, le style Wu. Nombreux sont les styles qui demeurent encore aujourd'hui. Chaque style avaient ses particularités mais tous se conformaient aux principes classiques du Taiji. Aujourd'hui le style de Taiji tel qu'il était pratiqué dans les temples reste le plus authentique. Avec l'évolution de la société industrielle qui offre peu de place pour un système aussi sophistiqué, cette conception est en voie de disparition de même que la mode familial d'enseignement...
... Si quelqu'un s'investit sérieusement dans le l'étude du Taiji, dans une recherche de l'art authentique, alors le style monastique fait son apparition. On peut apprécier à sa juste valeur le courage et le dévouement des maîtres qui ont préservé la lignée du Taiji monastique au cours du temps. Ceci est notre héritage.
Waysun Liao. Les Trois Classiques du Tai Chi Chuan.